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Andrejz Wajda

Andrejz Wajda

Andrzej Wajda 1926 - 2016

Un très grand du cinéma mondial

 

Le cinéaste Andrzej Wajda est mort le 9 octobre dernier à Varsovie à 90 ans. Donald Tusk, ancien premier ministre de Pologne et actuel président du Conseil européen, a déclaré :

- Nous voyions la Pologne et nous nous voyions nous-mêmes à travers lui. Cette phrase souligne le profond enracinement de l’œuvre de Wajda dans l’histoire tragique de son pays.

 

Un tragique très tôt éprouvé personnellement…

Son père Jakub Wajda, officier polonais, fut en avril 1940, parmi les milliers de victimes du massacre de Katyn* perpétré par le NKVD, la police politique soviétique.

Wajda en a tiré en 2007 un film qui racontait, entre autres, le mensonge entretenu par le régime communiste et la recherche de vérité des Polonais qui ne sera révélée qu’en 1990 par Gorbatchev.

Lui-même, à 16 ans, s’engage dans l’Armée de l’intérieur – AK-Armia Krajowa – mouvement de résistance rattaché au gouvernement polonais en exil à Londres. C’est l’AK qui a lancé l’insurrection de Varsovie écrasée par les Allemands en octobre 1944.

Après avoir commencé des études d’art à Cracovie, Wajda entre à l’école de cinéma créée en 1948 à Lodz, aujourd’hui encore, l’une des plus prestigieuses d’Europe et qui se révéla rapidement une extraordinaire pépinière.

 

Son œuvre

La lutte contre l’occupant nazi a largement inspiré l’œuvre de Wajda. En 1957, Kanal, film primé à Cannes, raconte la fuite des résistants dans les égouts de Varsovie. En 1958, Cendres et diamant, distingué à Venise, retrace le passage de la lutte contre les nazis à la révolte contre les Soviétiques.

Aux films consacrés à la Résistance, succède une série de longs métrages évoquant d’autres épisodes de l’histoire polonaise : en 1959 La dernière charge retrace l’attaque, sabre au clair, de la cavalerie polonaise contre les blindés nazis. Cendres en 1965 rappelle le combat des Polonais aux côtés des troupes napoléoniennes.

 

Une inspiration puisée dans la littérature nationale

Noces tourné en 1973 d’après Wyspianski est une splendeur esthétique, puis en 1975, Terre de la grande promesse d’après le livre de Wladyslaw Reymont, prix Nobel de 1924. Il s’agit de l’évocation du capitalisme textile triomphant au 19e siècle à Lodz.

Malheureusement, notamment en France, des critiques ont fait peser sur l’œuvre le soupçon d’antisémitisme, au prétexte fallacieux que parmi les patrons exploiteurs figuraient des Juifs…

En 1977, L’Homme de marbre – enquête sur la vie d’un stakhanoviste célébré par le régime – fut un immense succès en Pologne où les places se sont vendues au marché noir ! Edward Gierek, premier secrétaire du Parti fut attaqué pour avoir autorisé la sortie du film, présenté à Cannes. Il est le premier opus d’une trilogie qui s’inscrit dans les luttes sociales du pays.

En 1981, L’Homme de fer, clair soutien à Solidarnosc, obtient la palme d’or à Cannes. Il sort peu de temps avant l’arrivée au pouvoir du Général Jaruzelski.

En 2013, L’Homme du peuple, centré sur Lech Walesa, fut le troisième élément.

 

Solidarnosc

Ami de Bronislaw Geremek* et de Tadeusz Mazowiecki* aujourd’hui disparus et d’Adam Michnik, Wajda avait accepté de se présenter sur les listes de Solidarnosc, aux premières élections semi-libres de 1989. Il a activement participé à la campagne et fut élu sénateur.

A l’inverse d’un certain nombre de grands cinéastes polonais – Roman Polanski, Jerzy Skolimowski, Walerian Borowczyk ou encore Andrzej Zulawski – Wajda s’est toujours efforcé de travailler en Pologne. Ce n’est que sous contrainte économique, la fermeture de sa société de production, qu’il a épisodiquement tourné à l’étranger.

Il en est ainsi en 1983, de Danton en France avec Gérard Depardieu dans le rôle-titre et la même année Un amour en Allemagne avec Hanna Schygulla.

 

2016, son dernier film

Afterimage, relate les démêlés du peintre Wladyslaw Strzeminski. Il a été interprété comme un avertissement contre le retour possible de la censure depuis l’arrivée au pouvoir du parti ultra-conservateur Droit et Justice, PIS. Le cinéaste et sa femme, l’actrice Krystyna Zachwatowicz, ne cachaient pas leur désaccord avec ces orientations.

Au total, Andrzej Wajda laisse une ample œuvre : quelque cinquante films pour le cinéma et la télévision et une quarantaine de mises en scène de théâtre.

A l’annonce de la mort de celui qu’il considérait comme un ami proche, Lech Walesa a déclaré :

- Nous allons bientôt nous retrouver, mes bagages sont déjà faits.

Janina Cohen

*Les exécutions qui ont concerné quelque 22000 Polonais furent perpétrées en au moins six lieux distincts, mais Katyn, près de Smolensk, reste emblématique de ces crimes.

*Bronislaw Geremek mort en 2008 fut ministre des Affaires étrangères et un des négociateurs du compromis du printemps 1989.

*Mazowiecki fut de 1989 à 1991 chef du premier gouvernement non communiste.

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